Chapitre VI

Un bilan catastrophique

                          

eaubonne 1 « La dimension absolument nouvelle du problème politique mondial n’est que l’aboutissement lointain d’un chemin pris depuis l’âge de bronze en Europe. » Françoise d’Eaubonne, Les femmes avant le patriarcat.

            

  - État des lieux

Kraus     « Le diable est bien optimiste s’il pense pouvoir rendre les humains pires qu’ils ne sont… » Karl Kraus (1874-1936), cité par Roland Jaccard dans  L’enquête de Wittgenstein.

    L’homme n’est plus que quincaillerie.

    Ses machines font plus que le conditionner, elles l'instrumentent, l'emprisonnent, le submergent, le subjuguent, le dépassent, le rapetissent et le dissolvent.

Latouche 1     L’incontournabilité de la technique, sa prééminence rendent l’homme dérisoire.

« La technique crée des problèmes qu’elle seule est capable de résoudre. La technique appelle toujours plus de technique. » Serge Latouche, La Mégamachine.

Jusqu’au moment où l’on s’aperçoit qu’elle ne fait que cumuler les désastres.

 

« Nous pouvons contrôler l’atterrissage en douceur d’engins spatiaux sur des planètes éloignées, mais nous sommes incapables de contrôler les fumées polluantes émanant de nos autos et de nos fabriques » Fritjof Capra, 3e  Millénaire mars 1987.

    « Qui se sert des machines use de mécaniques et son esprit se mécanise. Qui a l’esprit mécanisé ne possède plus la vertu de l’innocence et perd ainsi la paix de l’âme… »  Tchouang-Tseu.

Don Quichotte    « Toute votre machine est devenue si inhumaine qu’elle en est devenue naturelle. En devenant une seconde nature, elle est devenue aussi lointaine, aussi indifférente, aussi cruelle que la nature […] Vous avez construit votre système sans vie à si grande échelle que vous ne savez pas vous-mêmes comment ni où il frappera. Voilà le paradoxe ! Tout est devenu incalculable à force d’être calculé. Vous avez attaché les hommes à des outils si gigantesques qu’ils ne savent pas à qui les coups sont portés… » G. K. Chesterton, Le Retour de Don Quichotte (cité par Matthieu Amiech et Julien Mattern dans Le cauchemar de Don Quichotte). ellul

« On produit ce dont on n’a aucun besoin, qui ne correspond à aucune utilité, mais on le produit parce que la possibilité technique est là ». Jacques Ellul, Le bluff technologique.

Et grâce à la publicité et plus généralement aux médias, on invente l’utilité ensuite.

Le monde moderne fourmille d’exemples illustrant le déséquilibre entre le yin et le yang.

 

« En lui  [le Sage], Ciel et Terre, yin et yang s’équilibrent parfaitement ; il n’est plus affecté par le jeu des contraires.

"Un tel homme laissera l’or dans les collines et les perles au fond de l’océan. Il ne cherchera ni la richesse, ni le renom. Il ne se réjouira pas à la perspective d’une longue vie, non plus qu’il se désolera si la mort vient le frapper prématurément. Ses succès de l’enfleront pas, ses insuccès ne le chagrineront pas". Tchouang-tseu XVII. »

J.-C. Cooper, La philosophie du Tao.

    Le gaspillage énorme et quotidien est la conséquence inéluctable d’un système technicien en constant développement.

La technique fait adorer des produits le plus souvent inutiles et dérisoires sur les quels les benêts se précipitent, tout en larmoyant sur l’insuffisance de leur pouvoir d’achat. Mais le gadget 1 bonheur est impossible à réaliser puisque la technique, au service du seul profit, ne cesse de créer de nouveaux besoins ; la quête du bonheur est devenue un course infernale et sans fin.

   L’homme ne vaut même pas la machine qui le remplace : la délivrance des billets par Internet, met au rancard (au chômage) le guichetier ; la caissière de supermarché est mise également au rancard avec l’arrivée des caisses automatiques, alors que l’argument de l’implantation de ces temples de la consommation était justement la création d’emplois !

Les technocrates cherchent a enrayer les crises économiques par encore plus de technique, alors que c’est elle qui les crée.

Latouche 2 « Les ingénieurs, en faisant leur travail au mieux, contribuent, à leur insu le cas échéant, à la croissance illimitée des techniques. Ces techniques fournissent des moyens toujours nouveaux et toujours plus raffinés pour déposséder les citoyens de la maîtrise de leur propre vie. » Serge Latouche, La Mégamachine.

    L'homme n’a plus d’existence réelle, il n’est plus que le faire-valoir de ses machines. La preuve de son conditionnement, c’est qu'il est persuadé de maîtriser les objets qu’il produit, alors qu’il s’identifie à eux et qu’il leur révolte 1 ressemble de plus en plus. Il est étonnant que cette domination si intolérable de la technique soit… si bien tolérée et qu’elle n’aie produit aucune « résistance », ni aucun acte terroriste depuis la révolte des ouvriers, à Lyon en 1806, qui ont fracassé et brûlé une machine à tisser « Jacquard », ainsi que les « luddistes » en Angleterre en 1811, qui engagèrent une véritable guerre contre les fabriques.

Et personne, bien sûr, ni à cette époque ni aujourd’hui, n’a pensé à taxer les produits fabriqués par ces nouvelles machines, afin de financer des formations pour ceux qui en seraient victimes, ou pour alimenter les caisses de solidarité sociale.

Évidemment parce que l’objectif de ces machines est de faire tomber le coût de production afin d’être compétitif. Et taxé, le produit ne sera pas plus concurrentiel qu’avant sur les marchés extérieurs. La recherche du profit étant le seul objectif dans tous les pays en concurrence, aucun système privilégiant l’homme par rapport à la machine n’est donc possible. Cela signifie que toute l’économie mondiale repose depuis des siècles sur un système de négation de l’être humain.

    « … Si Dieu n'existe pas, l'homme est forcément moins performant et moins utile qu'un ordinateur… »  M. G. Dantec.

cerveau 3     En fait, à l’heure actuelle, pour un même volume, le cerveau est encore plus performant que l’unité centrale et les mémoires d’un ordinateur, mais nous ne savons pas l’utiliser. Quelques personnes en font régulièrement l’expérience lorsqu’elles se réveillent brusquement et se souviennent très bien de la fin de leur rêve, où elles avaient en mémoire des paroles de chansons, des textes, ou des images, qu’à l’état d’éveil il leur aurait été impossible de se remémorer. Cela peut montrer que, sans aucune exception, tout ce dont nous avons connaissance, tout ce que nous voyons ou entendons durant toute notre vie, est emmagasiné dans notre mémoire. mémoires 3 Comment le cerveau peut-il stocker ces milliards de milliards d’informations ? Personne ne peut encore le comprendre. La quasi-totalité de ces données ne nous servent jamais, sans doute, parce que nous n’avons pas su imaginer un système de classification adéquat. Mais peut-être que notre cerveau n’est qu’un récepteur, et que toutes les mémoires se fondent dans une sorte de conscience collective et universelle où là, elles seraient en effet triées, classées et utilisées. H 2 Avec la physique contemporaine, l’improbable est possible, même les amusements du mental les plus saugrenus.

    Jusqu'à une époque récente l'homme était à la merci de la nature ; aujourd'hui il est aussi à la merci de ses inventions, et pourtant, totalement inconscient des dangers des techniques qu'il met en œuvre. Comme dans le cas de la bombe atomique, il fait confiance à quelques débiles mentaux assoiffés de pouvoir, élus très démagogiquement ( à noter que démocratiquement est dans le dictionnaire, mais pas démagogiquement ). Il est donc incapable d'imaginer un arrêt ou un ralentissement du progrès technique et un changement de direction.

Il est bien difficile d’être juge et partie ; de profiter sans retenue du progrès et de réfléchir à ses conséquences, de percevoir que les grandes innovations technique sont toujours puissamment chargées idéologiquement.

pétrole 3     L’invention du moteur à explosion et l’utilisation du pétrole comme carburant à un prix dérisoire, a fait croire à l’homme que tout lui était possible ; et en effet il a usé et abusé de cette puissante force motrice, jusqu’à se faire transporter, tout seul, par un engin de plus d’une tonne !

Avec un baril de pétrole, dont le prix était d’environ 30$ dans les années 80 et 100 en 2008, on peut effectuer en un temps record, un travail qui nécessiterait sinon douze hommes pendant un an !

pollution 1 Le problème c’est que nous sommes près d’un milliard au volant de notre voiture, et demain,  trois fois plus. L’effet de serre est encore contesté par de nombreux apôtres de la foi en l’homme et en ses techniques prétendument capables d’annuler les effets désastreux de… ses techniques. La mer de Glace près du mont Blanc a reculé de neuf kilomètres en 150 ans ; que comptent-ils faire pour qu’elle reprenne sa place ?

Giec 1     Il aura fallu qu’un grand nombre de savants de la planète cautionnent les travaux du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) pour que l’opinion publique prenne conscience de ses lendemains malsains.

Giec 3     « L’étude des calottes glacières montre que notre atmosphère n’a presque pas bougé durant la période allant d’il y a dix millénaires à l’an 1850. Ensuite, à cause des débuts de l’ère industrielle, l’équilibre se modifie. La teneur en gaz carbonique (CO²) augmente de 36%, passant de 280 parties par million (ppm) avant 1750, à 380 ppm aujourd’hui. Même accroissement en vitesse accélérée pour le méthane ou certains oxydes d’azote, dont la quantité a doublé. Même s’il y en a moins dans l’atmosphère que le gaz carbonique, l’impact du méthane sur l’effet de serre est vingt fois plus important que celui du CO². » Journal Aujourd’hui en France, du 29 janvier 2007.

Le Printemps silencieux, de la biologiste américaine Rachel Carson publié en 1962, lança le mouvement écologiste aux État-Unis :

Carson  « Pour la première fois dans l’histoire du monde, chaque être humain est désormais exposé au contact avec des produits chimiques dangereux, depuis la conception jusqu’à la mort. »

Pour l’auteur, les pesticides, au premier rang desquels le DDT sont cancérigènes, ce sont des « élixirs de la mort ».

Après la parution de ce livre prémonitoire, un grand savant, J. L. Baldwin, professeur de bactériologie agronomique à l’université du Wisconsin, signe un article dans la revue Science où « il souligne l’ignorance [de Rachel Carson] de l’histoire des relations entre l’homme et la nature, son incompétence en épidémiologie, la façon biaisée dont elle oppose les agents chimiques naturels et synthétiques, ses partis pris dans l’exploitation de la littérature sur les DDT, dont la dangerosité pour l’homme n’a pas été établie. » Cité par John Tierney dans le New York Times.-

Il aura fallu attendre 1970 pour que le DDT soit interdit dans la plupart des pays.

La grande masse des gens croient leurs savants, et lorsque ceux-ci les trompent, ils se rangent ainsi parmi les grands criminels, mais en revanche, ils ne sont jamais condamnés. 

    Croire que la science et les techniques vont pouvoir résoudre les problèmes relève du cynisme. Dans l’Aude, malgré la fermeture de la mine d’or de Salsigne en 2002, plus de cinq années après, les habitants de la vallée continuent de subir les conséquences de la pollution au cyanure, à l’arsenic et aux métaux lourds.

    De tels mauvais exemples se retrouvent partout dans le monde, et la science n’est pas capable d’inventer une machine à voyager dans le temps afin de revenir en arrière pour réparer ses erreurs. Bien plus, l’appât du gain et le cynisme gagnent des pays jusque là préservés : des laboratoires pharmaceutiques, ne pouvant plus produire dans les pays industriels où la population est informée sur la pollution et le danger des rejets sur la santé, vont s’installer dans les pays pauvres, comme en Inde, où ils occasionnent d’immenses dégâts dans l’indifférence générale.

« Plus de sciences, plus d’industries et plus de techniques ne conduisent pas nécessairement au bonheur mais fait peser un nombre croissant d’incertitudes sur notre avenir » Dominique Bourg, Peut-on encore croire au progrès ? (ouvrage collectif)

« En améliorant les performances de l’économie industrielle, grâce à l’informatique, à la physique du calcul, on augmente la puissance de cette civilisation militaro-industrielle qui détruit les autres modes de production, les autres cultures, et dévore les ressources naturelles à une allure vertigineuse » Jacques Grinevald, Peut-on encore croire au progrès ? (ouvrage collectif).

    Continuons avec le pire : dans un avenir proche, des organismes vivants aux propriétés insoupçonnées et qui n'auront encore jamais été créés sur la terre, de nouvelles chimères, vont inéluctablement sortir des laboratoires de génie génétique.

« La fécondation d’un ovule de femelle de chimpanzé par un spermatozoïde humain a été menée avec succès dans un laboratoire américain. L’embryon a certes été détruit, mais on voit les dangers ouverts par de telles expériences. » Serge Latouche, La Mégamachine, p 78. 

monod1 « La génétique va toucher ceux qui ne sont pas encore là ; c’est pire que d’assassiner ceux qui sont ici ». Théodore Monod, Arte 8/12/2007.

    D’autant plus que la génétique est en train de devenir une arme redoutable :

guerres 1 « Une révision et un renforcement de la convention de 1972 sur les armes biologiques sont demandés par les chercheurs britanniques. En effet d’ici 10 ans, le décryptage du génome humain permettra de cerner les différences génétiques existant entre les différentes populations humaines ; il sera possible de mettre au point des vecteurs biologiques (virus, bacilles) inoffensifs pour certaines ethnies et mortels pour d’autres. » Sciences et Avenir, mars 1999. 

Le Docteur Jacques Costagliola, dénonçait en 1990, dans une Lettre ouverte à la Commission nationale d’éthique, les apprentis sorciers et les dérives de certaines recherches en biologie génétique, suite à la création par deux professeurs du C.N.R.S. d’une nouvelle bactérie baptisée Salmotichia eschenella.

« Ce ne sont pas seulement des cellules qu’on a hybridées mais deux organismes, deux espèces, deux genres même ! Il s’agit d’un échange massif d’une grande partie de leurs génomes. Ce qui, dans la nature, ne peut se faire qu’entre bactéries d’une même espèce et seulement par apport à sens  unique. Il a donc fallu, pour y parvenir, supprimer le verrou de protection contre les mésappariements, barrière entre espèces, ce qui suscite chez les auteurs un orgueil faustien. »

    L’homme n’a jamais jusqu’à maintenant été si en péril, mais il ne s’en rend pas compte et ne se préoccupe que du panem et circenses.

    Il est effarant comme la plupart des discussions des gens paraissent futiles. L’on dirait que leur seule utilité est de faire fonctionner le mental. Comme si on avait peur qu'il s'arrête. Un peu comme ces camions dans le grand Nord dont on laisse tourner le moteur de peur de ne plus pouvoir le faire redémarrer. 

    Méfions nous des distractions futiles. Elles ne sont pas innocentes, elles perfusent la soumission.

                           La télévision

    «… La télévision est l'instrument de l'avilissement et de la crétinisation des foules…» Salvador Dali.

télé 2     Comment des responsables de chaînes publiques peuvent-ils laisser diffuser des émissions où l’on voit des sketches de « caméra cachée » innommables, comme celui où un animateur urine sur l’étalage de fruits et légumes d’un épicier ! La colère du commerçant et les réparties du pitre de service font s’esclaffer tous les invités : élus, artistes, écrivains et autres membres de cette bien triste « intelligentsia », toujours de connivence, même sur la stupidité la plus insoutenable. Pour faire rire le bon peuple, doit-on obligatoirement blesser et outrager le premier quidam venu ?

    Qui peut encore nier l’évidence d’une décadence par un accroissement de la masse ? Si le mal ne date pas d’aujourd’hui, s’il est profondément ancré dans la nature de l’homme, le progrès technique et la démesure de la masse humaine, lui donnent une force de destruction jamais égalée.

    Alfred Capus (1858-1922) qui est pourtant décédé avant l’avènement de la télévision, en avait senti les prémices en écrivant que « si les imbéciles ont toujours été exploités, aujourd’hui [on peut rajouter grâce à la télé], ils triomphent, voilà pourquoi le monde est perdu ! »

Déjà en 1938, Théodor W. Adorno voyait dans le cinéma et la musique populaire des instruments d’infantilisation générale des mentalités.

En revanche, Walter Benjamin pensait que bien utilisés les médias pouvaient permettre d’éduquer le peuple. Mais que signifie bien utiliser ? Alors que ces instruments de pouvoir sur les foules ne peuvent être détenus que par des marchands, des faiseurs de profits ou par des gouvernants qui bien sûr, s’en serviront pour se maintenir au pouvoir, si tant est qu’ils ne soient pas déjà au service des premiers. Le rêve de tous les fascismes, c’est d’abrutir les peuples. Avec la télévision ils y sont arrivés, tout en pouvant conserver le décorum de la démocratie.

    Les émotions et les sentiments de peur, de jalousie, de haine, sont la nourriture du mental comme les pâtes ou le poisson sont la nourriture du corps. Une mauvaise alimentation de l’esprit entraîne toujours  un mauvais développement de soi et la confusion mentale.

    Les gens ne se rendent pas compte que l’agressivité, la violence, la bêtise et l’absurde qui constituent la trame de la plupart des spectacles, films, jeux, feuilletons, journaux, débats, créent en eux des émotions négatives qui s’ajoutent à télé 3 celles qu’ils subissent dans leur vie quotidienne. Ces émotions négatives résultent de leur identification à des situations, à des enjeux ou des drames qui n’ont pourtant rien à voir avec eux. Ces angoisses artificielles et totalement vaines, non content de coloniser avec subtilité leur mental,  pompent leur énergie, leur puissance vitale et donc les affaiblissent psychiquement. Sans parler des conséquences sur un enfant, qui, à cause de la télévision, connaît déjà toute la gamme possible des émotions négatives. La plupart des gens ne voudraient pas être taxés de pessimistes, ils pensent aimer la vie. Et les médias ne cessent de sacraliser la vie alors que le fond du système économique basé sur le productivisme la méprise, et instrumentalisme l’être humain pour en tirer un maximum de profit. Le véritable humanisme incite les hommes à se connaître eux-mêmes, mais les médias et la télévision en particulier les incitent à s’oublier eux-mêmes, à se réfugier dans des distractions qui multiplient leurs identifications à des images extérieures, afin qu’ils ne soient pas un, mais des milliers. En fait, dans le seul but de leur faire consommer des milliers de marchandises. 

    « Observe sur quoi chacun se concentre et tu comprendras d’où viennent malheurs et bonheurs ».  Lie Zi (env. 600 ans av. J.-C.).

Tous les sages depuis la plus haute Antiquité n’ont cessé de     recommander aux hommes de se garder des identifications à des valeurs, des modes et des modèles par essence impermanents et dérisoires. Or l’apparition de l’image de plus en plus envahissante avec l’avènement de la photographie, puis du cinéma et de la télévision, éloigne l’individu de lui-même, l’incitant sans cesse à des identifications successives et incohérentes, sans aucun lien entre-elles, lui fabriquant de nombreuses personnalités successives et contradictoires le plongeant dans une profonde schizophrénie permanente. Cela  explique l’incohérence de plus en plus évidente de la plupart de ses actes, et le pourcentage de plus en plus important dans la population des pays développés, de la délinquance et des crimes auxquels juges, avocats, et experts psychiatres semblent incapables de trouver une explication rationnelle.

pillules 2     C’est une des raisons pour lesquelles les gens ont de plus en plus recours à l’aliénation chimique, aux pilules miracles, antidépresseurs et autres anxiolytiques. Un véritable gâchis puisque ces victimes des médias modernes sont sûrement dotées des talents qu’elles pourraient développer au lieu de consacrer tout ce temps à la perfusion de surdoses de crétineries.

Ouspensky 2     « La machine humaine peut produire suffisamment d’énergie, mais si vous la dépensez par la colère ou la mauvaise humeur [la télévision ne sévissait pas encore à l’époque où Ouspensky écrivait cela !], très peu restera disponible pour le travail sur soi. Il est indispensable de réaliser qu’il n’y a pas une seule émotion négative qui soit utile. Elles sont toutes un signe de faiblesse… Nous pensons que les émotions négatives sont produites par les circonstances de la vie, alors qu’elles sont toutes en nous, à l’intérieur de nous… Il n’existe pas une seule raison Ouspensky 3 inévitable qui fasse que l’action de quelqu’un ou quelque événement puisse générer en moi une émotion négative. C’est seulement ma faiblesse. Nous avons des émotions négatives parce que nous les autorisons, nous les justifions, en expliquant qu’elles sont le résultat des circonstances, et ainsi nous ne les combattons pas. » P. D. Ouspensky, op.cit.

    La télévision étale au grand jour les turpitudes, les mesquineries, la bassesse de pensée des puissants, les poncifs et les stéréotypes des vedettes de tout poil, des héros de papier et des demi-dieux cathodiques du jour.

télé 1 La télévision-spectacle est faite pour attirer la publicité ; et comme elle doit donc être vue par le plus grand nombre, son seul critère est l’audimat, elle fait automatiquement le choix de ce qui excite et maintient l’attention. Elle préfère la violence à la paix, la compétition à la coopération, les invectives au dialogue, la moquerie et la calomnie à la réflexion. Des émissions débiles occupent le terrain, afin que le peuple ne dispose plus d’un seul moment de tranquillité pour méditer sur l’absurdité du monde.

« Méditer c’est comprendre ; la méditation du cœur est compréhension. Et comment puis-je comprendre s’il y a exclusion. En la compréhension il y a la paix, la liberté ; car on est libéré de ce qu’on a compris […] Si je ne me connais pas, mon action, ma pensée, sont sans fondement. Donc, la connaissance de soi est le début de la méditation. » Krishnamurti, La première et la dernière liberté. P 288.

« Méditer c’est donc purger l’esprit de son activité égocentrique.

[…] Il n’y a plus que le silence, le vide total. L’esprit cesse d’être contaminé par la société ». Krishnamurti, Le Livre de la Méditation et de la Vie. P 394.

   La méditation est pourtant le  passage obligé pour comprendre la cohérence de l’univers et trouver la paix ! Dire que le seul véritable héros de l’histoire gandhi 1 guerrière des peuples, c’est le mahatma Gandhi, qui sans combattre, a remporté la victoire sur les Anglais ! Alors quel anachronisme ces spectacles toujours de plus en plus sanguinaires au cinéma et à la télévision… comme si la bêtise et la violence ne pouvaient jamais finir !

    Quand la télévision ne déborde pas de violence et de vulgarité, elle dégouline de bons sentiments qui ne cachent qu’hypocrisie et duplicité. Elle veut faire croire encore et toujours, que « l’homme est bon et que c’est la société qui le corrompt », afin de rendre chacun aussi irresponsable qu’endoctrinable. Alors qu’à l’évidence la société n’est composée que d’hommes et de femmes, et que ce sont bien eux qui corrompent ou se laissent corrompre, et aucune entité au dessus d’eux. Ils sont responsables de leurs actes ignobles, sans aucune excuse, sans aucune circonstance atténuante.

« Une culture qui divinise le présent, comme la nôtre, se nourrit de thèmes intemporels qu’elle fait circuler par le biais de ses médias. Nos stories fonctionnent exactement comme des mythes, même les informations télévisées nous rapportent les mêmes thèmes sempiternels, ces accidents toujours identiques, autant de scènes primitives qui ont pris l’habit de la nouveauté. Le mythe est une méthode consistant à décrire le monde de telle sorte que rien de neuf ne puisse y survenir. »

« [Les séries télévisées] On y injecte dans les cerveaux des stories intemporelles, histoires d’amour, de violence, de persécution, de crimes, histoires de pertes et de retrouvailles, incidents chez les riches et les célèbres, chez ceux "qui peinent et ploient sous le fardeau", et la bonne nouvelle, là-dedans, c’est justement que rien n’arrive pour de bon. »

Peter Sloterdijk, Essai d’intoxication volontaire. (Pages 19 et 20).

télé 10     Le téléphage se plonge également dans l’insignifiant spectacle de la vie des stars parce qu’il a peur de se retrouver seul avec lui-même, seul devant l’angoissante question de la nullité de son existence. Pour compenser le peu d'attrait qu'il trouve à son propre destin, il vit par procuration des aventures qu'il juge à sa portée, parce qu'elles lui paraissent juste un peu moins bêtes que les siennes.

    C'est ainsi que les Américains n'ont vraiment le sentiment d'avoir existé que lorsqu'ils sont passés à la télévision.

    L'Amérique est aux antipodes de la spiritualité, aux antipodes de ce qui fait que l'homme n'est pas seulement un animal.

télé 8     Aujourd'hui, pour que la vie ait un sens, il faut devenir une image, une reproduction. Paradoxalement dans ce monde matérialiste, seuls les fantômes ont vraiment de l'importance. Simplement Être n'apporte que sentiment d'infériorité et de nullité. C'est un supplice pour un jeune de se sentir quantité négligeable lorsqu'il est cinq heures par jour devant son poste, face à des modèles, à des stars, à des dieux et des déesses auréolés de tant de prestige. La télévision nous plonge dans des successions d’identifications à des désirs, des besoins artificiels. Les médias nous incitent à nous identifier à des associations de pensées. Les médias nous perfusent des pensées toutes faites, le « prêt-à-penser ». La démocratie aurait prétendument gagné du terrain dans le monde. Or les jeunes d’aujourd’hui sont esclaves de la marchandise comme jamais cela n’a été dans l’Histoire. La Société spectaculaire marchande les endoctrine  avec une force inégalée, par cette faramineuse mise en scène permanente, dont le seul but est de valoriser la marchandise.

Télé 4     Aujourd'hui, pour exister, pour sortir du néant, il faut être consommé; il faut devenir un bien de consommation, une marchandise de masse reproduite à l'infini sur les écrans, dans les magazines, sur les murs. Pour exister il faut avoir été médiatisé, quitte à se faire remarquer par quelques exactions.

C'est l'univers de l'anti-sagesse. Plutôt que de chercher à être soi, on veut devenir quelque chose, « un produit travaillé, un modèle destiné à produire d'innombrables copies ». Günther Anders (111902-1994), L’obsolescence de l’homme.

télé 9     Même le langage nous incite à être la proie conditionnée de tout ce qui nous est extérieur. Le mot exister, signifie « se tenir à l’extérieur de soi-même », donc être séparé de soi.  Le contraire de ce que nous enseignent les sages.

Le conditionnement des peuples est devenu une science et les méthodes de manipulation des masses d’un Goebbels paraissent aujourd’hui bien archaïques. L’image est le plus efficace des instruments d’identification, donc d’endoctrinement.

 

« Dans les conditions actuelles, les capitalistes contrôlent inévitablement, d’une manière directe ou indirecte les principales sources d’information (presse, radio, éducation). Il est ainsi extrêmement difficile pour le citoyen, et dans la plupart des cas tout à fait impossible, d’arriver à des conclusions objectives et de faire un usage intelligent de ses droits politiques. » Albert Einstein, Pourquoi le socialisme, 1949 [la télévision n’en était qu’à ses débuts !].

 

« Les médias audiovisuels de masse sont contrôlés par des mégagroupes au sein desquels se concentrent les grandes firmes liées à Internet, à la téléphonie, à l’informatique, à l’énergie, à la publicité, au sport, à la banque etc. […]

Américanisation des esprits, vestimentaire, sportive, ludique, distractive, langagière, alimentaire […].

Leur faire aimer leur servitude, telle est la tâche de la propagande des rédacteurs en chef des journaux et des maîtres d’école, comme le prévoyait déjà Aldous Huxley en 1940 […]

L’Amérique s’est assurée le contrôle du vocabulaire, des concepts et du sens. Elle oblige à énoncer les problèmes qu’elle crée avec des mots qu’elle-même prononce. Elle fournit les codes permettant de déchiffrer les énigmes qu’elle impose. Journalistes, professeurs, fonctionnaires, dirigeants, sont les victimes consentantes de cette persuasion clandestine qu’ils vont ensuite diffuser partout. »  Ignacio Ramonet, Propagandes silencieuses, P 10.

    Grâce à la télévision, le dernier des imbéciles croit tout savoir sur tout, alors que plus personne ne peut donner un sens à sa vie.

    «  Un idiot peut poser en une minute des questions auxquelles le sage ne peut répondre en une vie. » Ambrose Bierce (1842-1914), Mauvaises pensées.

Dans l’imagerie droitière, d’avant et d’après guerre, si le communiste était présenté avec un couteau entre les dents, les enchanteurs de la Marchandise sont aujourd’hui, grâce à la télévision, beaucoup plus dangereux, avec leur sourire éclatant, leur séduction, leurs images du bonheur, du bien-être, du confort, de l’efficacité, pour soumettre les esprits, les contrôler et surtout transmettre  l’idéologie du libre-échange absolu, sans états d’âmes sur ce que ces images exploitent en chacun de nous : l’envie, la vanité et le vain espoir. Et sans jamais un bémol sur les conséquences dramatiques du productivisme et du profit comme seuls objectifs, sur les peuples et la nature. Même le « développement durable » est aujourd’hui, un moyen de doper la croissance et les profits, tout en ponctionnant encore une classe moyenne exsangue.

 

télé 5     Ceux qui détiennent la télévision, disposent d’un instrument surhumain d’endoctrinement. Avant l’avènement de la télévision, l’opinion publique était déjà façonnée par la presse écrite, mais cette dernière était très diversifiée. Aujourd’hui, non seulement la presse écrite et les radios ne reposent quasiment que dans une seule main, mais la télévision crée les modes de pensée, décide de ce qui est bien et de ce qui est mal, sans aucune contestation possible, et dans le seul but de vendre, ce qui est le comble du non-sens. Un endoctrinement pour habituer tous les téléspectateurs à ce qui est appelé à tort  « La Mondialisation » et qui n’est autre que la Tyrannie de la Marchandise, et, cachée derrière elle, la dictature de la Finance mondiale.

télé 7     L’homme d’aujourd’hui, consomme des antidépresseurs, des neuroleptiques, des tas de calmants et d'excitants. Il boit et il fume pour ne pas prendre le temps d'écouter son mal de vivre. Incohérence de l'homo sapiens, aussi ahuri qu'hébété sur cette planète, et qui, sans état d’âme, continue à donner la vie.

    Il semble que ce qui est important aujourd’hui, ce n’est pas d’apprendre aux jeunes à réfléchir, mais de les entraîner par le jeu, à piloter demain des robots, à devenir eux mêmes des automates manipulateurs de robots, ou ce qui est plus grave, des automates manipulateurs de robots de destruction des ennemis du pouvoir, c’est-à-dire, des ennemis de l’Ordre de la Finance mondiale.

Selon Steven Johnson, Courrier international n°764, « la télévision rendrait plus intelligent, parce que nous disposons de beaucoup plus d’informations qu’avant ».

Mais quelles informations, celles qui sont déjà prédigérées et qui ne laissent aucun moment pour la réflexion ? Les jeux vidéo et les séries, même violentes,  auraient « une valeur nutritive pour l’esprit » ! Il ne s’agit certainement pas de l’« esprit »  au sens spirituel du terme, mais du mental, qui encombré de scories médiatiques, a même perdu tout bon sens. Mais certains pseudo-scientifiques comme ce « diplômé cerveau 2 en sémiotique », pensent qu’à force d’énoncer des contre-évidences, on finira par les croire.

    En revanche pour la quasi-unanimité des pédiatres, comme  l’Allemand Peter Winterstein, la plupart des troubles que l’enfant connaît aujourd’hui, sont  liés à l’abus de la télévision, qui les plonge dans un état proche de l’hypnose. Les ondes lentes, « alpha », celles de l’émotion, prennent le pas sur les ondes « bêta », celles de l’éveil.  L’esprit critique et la capacité d’apprendre s’estompent. Selon le psychiatre Serge Tisseron, devant des images violentes, le cerveau réagit comme si elles étaient réelles. télé 6 Habitué à ces images, l’adolescent va pouvoir les reproduire, à l’occasion, sans se rendre compte de leur véritable  « réalité ». Des études ont d’ailleurs montré la corrélation entre l’addiction aux émissions et aux films violents et le parcours judiciaire de jeunes délinquants. Ces émissions, en créant de l’angoisse, génèrent le « syndrome du monde méchant » qui incite à chercher la sécurité au sein d’un groupe, qui, par self-défense, ne pourra être que violent vis à vis de l’extérieur.

                 - La secte des publicitaires

Lafargue 2     « Le grand problème de la production capitaliste n’est plus de trouver des producteurs et de décupler leurs forces mais de découvrir des consommateurs, d’exciter leurs appétits et de créer des besoins factices. » Le droit à la paresse, Paul Lafargue (1842-1911).

    L’objectif de la publicité est de faire que les désirs supplantent les besoins, et donc de transférer sur des objets achetables et bien souvent inutiles, les désirs qui portent sur ce qui est inaccessible. La publicité est un hymne à la possession d’objets superflus, elle renforce les sentiments d’envie et de jalousie entre les individus. Hara Kiri 1 Le slogan de Hara-Kiri Hebdo dans les années soixante dix, « La publicité vous rend cons », s’est révélé d’une grande justesse : celui qui est amené à désirer ce dont il n’a pas vraiment besoin ou ce qu’il ne pourra acquérir a bien été transformé en simple d’esprit, en sot, en idiot.

    Depuis cette époque, les budgets de publicité ont été multipliés par cent et en effet, nous sommes devenus cent fois plus idiots.

    Grâce à la publicité il y a toujours plus à consommer et toujours plus à gagner pour les vendeurs d’illusion.

pub3     François Brune, dans un article de Casseurs de pub cite la formule populaire, reprise par Molière : « Il faut manger pour vivre et non vivre pour manger » en la reliant à « Il faut consommer pour vivre et non vivre pour consommer ». Imaginons dit-il, qu’à chaque fois que l’on emploie le terme consommateur dans la vie de tous les jours et dans les médias, on le remplace par mangeur. Par exemple : «D’après le dernier sondage, le moral des mangeurs n’est pas fameux… » ou « La reprise dépend essentiellement du comportement des mangeurs » ou encore « Les associations de mangeurs réagissent contre la publicité mensongère » etc. L’intérêt de cet artifice est de nous montrer que « Consommateur, c’est notre destination, notre essence d’acteur social, notre vocation ». Nous ne sommes plus que cela.

    « Tel est le but de tout conditionnement : faire aimer aux gens la destination sociale à laquelle ils ne peuvent échapper. » Aldous Huxley.

    Un conditionnement qui aboutit à un mode unique de pensée, donc à une idéologie.

pub2     « Les coupures de films par la publicité à la télévision, qu’on nomme à juste titre "saucissonnage", sont révélatrices à cet égard. On peut douter en effet de leur efficacité commerciale à court terme. Mais au plan idéologique, en revanche, elles jouent pleinement leur rôle, qui est de signifier rituellement au spectateur : "Attention, ne crois pas que tu vas pouvoir t’évader impunément dans la fiction : n’oublie pas que tu es un consommateur, que tu dois le demeurer au moment même où tu pensais t’en abstraire ". » François Brune.

cosmétique 3     C’est ainsi que la publicité fait croire que la consommation est le seul moyen d’accès au bonheur, qu’il n’y a pas d’autre choix. Du coup, la consommation est la valeur en soi ; celui qui ne s’y soumet pas est un ringard, et plus il est jeune, plus il se sentira frustré, exclu.

Depuis que les démagogues promettent le droit au bonheur, sans d'ailleurs savoir exactement en quoi il consiste, les électeurs croient que tout leur est dû et en particulier le droit à la santé. Il est ringard de vieillir, il est interdit de montrer une ride. Pourtant la maladie fait partie de la vie comme le vieillissement. Aujourd'hui tout le monde est conditionné à diviniser la jeunesse parce que la jeunesse est le support exclusif de la publicité.

cosmétique 2     Une publicité sur trois s’adresse à la jeunesse. Des jeunes qui ne sont pas des êtres à part entière, des individus, mais qui ne sont plus que des accélérateurs de consommation. Plus les enfants et les adolescents regardent la publicité à la télévision, plus l’économie se porte bien, plus les sociétés prospèrent, plus la bourse monte, plus  la planète se couvre de déchets, plus les frustrations s’exaspèrent, plus la violence règne dans la rue, plus se fomentent des guerres et des révolutions pour conserver ou gagner des marchés, des matières premières ou des mains-d’œuvre à bas prix.

    Ceux qui affirment que ce n’était pas mieux avant ne font que pécher par ignorance, tout en révélant la force de l’endoctrinement. Quand il n’y avait pas encore de télévision privée en France, chaque émission devait respecter le règlement de la RFP (Régie Française de Publicité). Surtout l’article qui interdisait aux mineurs de tourner dans les films publicitaires, afin, y était-il précisé, de ne pas abuser de la vulnérabilité du jeune téléspectateur. Il était également interdit de diffuser une publicité dans laquelle jouait un acteur qu’on pouvait également voir dans le film où l’émission qui suivait. Des gens réfléchis, des sages, avaient pensé à ces choses. RFP Pourquoi ces règlements ont-ils été supprimés avec l’ORTF ?  Par souci de liberté ? On a livré le peuple au Tyran Marchandise et on a fait en sorte également, que l’école devienne incapable de former de véritables citoyens conscients et réfléchis. C’est à partir de ce moment que la publicité est devenue la raison d’être de la télévision, et la télévision, l’instrument du formatage des homo consommatus.

    « Les publicitaires, c’est comme les dealers, ils attendent les en casseurs de pub 1 fants et les ados à la sortie des écoles et des lycées. Ils savent très bien que plus ils prennent les jeunes tôt, plus il sera dur après pour eux de se désintoxiquer de la consommation. » Casseurs de pub n°28.

    Il y a décidément peu de mesure en ce monde. D'un côté on voile les femmes et on les cloître afin qu'elles ne tentent pas les hommes à l'évidence si pieux. Elles sont cantonnées dans le rôle de servante et de génitrice, selon le désir d'Allah. En oubliant d’ailleurs, que la première femme du prophète, Khadîja, était une « femme de tête » et gérait plusieurs troupeaux de chameaux. De l'autre côté le Commerce omniprésent dévoile le corps de la femme, l'offre, l'instrumentalise, transforme son sexe en embellisseur émotionnel de la marchandise. Il n'y a jamais de voie du milieu dans ce monde absurde.  femme objet 2

La secte des publicitaires manipulateurs du mental est la pire de toutes. Par le matraquage radiophonique et télévisuel, la publicité incruste les mensonges dans le mental, et l’individu en perd la notion du vrai et du faux.

    En 2004, la dépense mondiale de promotion publicitaire dans les médias (journaux, magazines, télé, cinéma, Internet et affichage) atteignait 343 milliards de dollars (The Economist 26-6-2004), soit l’équivalent du Produit national brut de tous les pays d’Afrique subsaharienne.

    En France, chaque ménage a dépensé en 2004, 1200 euros de publicité (31,2 milliards / 26 millions de ménages).

femme objet 1     La publicité est le nerf de la guerre des médias. Et les médias, quels qu’ils soient, sont au service des publicitaires. Avec 70% du chiffre d’affaires venant de la pub, celle-ci est une nécessité vitale impossible à remettre en question. Aucun article critiquant un annonceur ne peut passer dans un journal, la sanction serait immédiate, le  retrait du budget publicitaire.

    La liberté de la presse n’est plus qu’un mythe. Les médias sont devenus des instruments de propagande et d’imposition de l’idéologie dominante (croissance et consommation qui mènent dans le mur !).

    « Les journalistes se proclament indépendants de tous pouvoirs ; ils ne se sentent pas asservis parce qu’ils ignorent les mécanismes de sujétion qu’ils ont intériorisés. » Alain Accardo.

Libération     Le quotidien  Libération fut créé en 1973 par Jean-Paul Sartre pour « lutter contre le journalisme couché ». Il se voulait libre de tous pouvoirs : « Il n’y aura pas de publicité car les annonceurs, en finançant la presse, la dirigent et la censurent. » Une belle intention qui a fait long feu !

    En occultant toute critique profonde de notre système de croissance-consommation, les médias sont devenus un obstacle majeur à la transformation de la société vers plus de véritable justice sociale, de liberté et de responsabilité.

    La publicité offre deux pouvoirs de conditionnement à celui qu’elle sert. Le premier, évident, en incitant à consommer, surtout des produits inutiles ou mêmes nocifs pour la santé du corps et du mental. Le second, plus sournois, en empêchant les journalistes de faire leur métier, qui est de dévoiler la réalité derrière les apparences, puisque la presse, est de plus en plus, pieds et poings liés par les annonceurs, c’est à dire par d’énormes groupes financiers internationaux.

    La publicité a remplacé la religion comme opium du peuple.

    Ses adeptes serviles se comptent aujourd’hui par milliards.

    Par la publicité et les médias, les masses sont incitées continuellement à péter plus haut que leur cul !

pouvoir d'achat2     « Les sirènes sont là pour créer un désir sans fin, un désir sans faim… elles éclaboussent les pages des magazines d'images et de propositions alléchantes, elles s'étalent en grand format sur les murs de béton ou dans les couloirs incurvés du métro, elles serinent et répètent jusqu'à satiété leurs refrains, elles nous jettent de la lumière plein les yeux, elles tracent dans le ciel les mots du désir. » Catherine Laroze, L'art de ne rien faire.

    Selon la formule de Romain Gary, nous vivons dans une société du harcèlement publicitaire et journalistique qui ne nous laisse aucun répit et fausse en permanence notre jugement et le bon sens. 

    Socrate dirait aujourd'hui comme hier : « Combien il y a de choses dont je n’ai pas besoin ..! » 

pub1     Il faudrait se faire vacciner dès l’enfance contre la fièvre acheteuse.

    Comment un comédien qui respecte son art, qui a choisi ce métier par passion, parce qu’on ne peut le pratiquer autrement, peut-il se compromettre dans la publicité ? N’est-il pas le premier collaborateur du Tyran Marchandise, du grand Déshumanisateur ? Alors que depuis la Commedia dell’Arte, l’acteur, a un rôle privilégié dans la critique sociale. Jusqu’à notre époque de la prise du pouvoir par les médias, les comédiens n’avaient jamais été au service des pouvoirs, politique, marchand, ou religieux.

           L’humanitarisme

    L’humanitaire est le substitut mercantile, infantile, hypocrite et dérisoire de l’humanisme.

Et, comme nous ne le répèterons jamais assez, que signifie cet humanisme, cette prétendue solidarité avec les plus pauvres du monde, de la part d’Occidentaux qui, depuis « Les Lumières », ont imposé à tous les autres peuples de la planète leur idéologie du profit. Ils se sont emparés de leurs territoires  par la force, les ont mis en esclavage, les ont colonisés, puis néocolonisés, dans le seul but affairiste, afin  de se prélasser ainsi, pire que des porcs dans leur fange, dans un prétendu confort aussi futile que criminel !

    « La vanité est un élément si subtil de l’âme humaine qu’on la rencontre là où on s’y attend le moins : aux côtés de la bonté, de l’abnégation, de la générosité. » Ernesto Sabato.

paradis fiscaux 1     Les prophètes de la Charité, certains naïvement, d’autres par calcul, servent de dégrippant aux rouages de la société afin que ceux-ci ne se bloquent pas. Pourquoi ne frappent-ils pas plutôt aux portes des milliers de Français très fortunés, qui vivent en Suisse pour ne pas payer d’impôts en France ? Bien sûr, c’est plus facile et bien hypocrite, de venir pleurer misère par le canal de la télévision, dans tous les foyers de ceux qui sont déjà écrasés de taxes et de prélèvements divers*. Toutes ces émissions, dites caritatives, parrainées par des vedettes du show-biz, qui se font payer la plus grosse partie de leurs cachets dans des paradis fiscaux, quel écœurement ! Mais soutenir une cause humanitaire, du footballeur au chanteur, c’est  à l’évidence incontournable pour leur image de marque.

* Selon les calculs des Contribuables Associés, « Les Français consacrent 196 jours sur 365 (soit jusqu’au 16 juillet) à financer le secteur public. Ils travaillent donc un jour sur deux pour l’État… Or au moyen âge, un homme était considéré comme serf lorsqu’il devait payer plus de 40 jours par an à son Seigneur ».

huma 1     « La générosité est un concept si noble que je m’interroge sur l’opportunité de choisir des évadés fiscaux (sportifs, artistes) afin de m’inciter, moi, contribuable non dé-localisable, à participer au financement d’opérations relevant de la solidarité nationale et donc de l’impôt. A.A (courrier des lecteurs, Télérama du 22 décembre 2004).

    Les médias intoxiquent téléspectateurs et lecteurs en glorifiant les top-models et autres vedettes qui auraient « le cœur sur la main » alors que le seul but de l’opération c’est encore de conditionner les pauvres et tous les exploités pour qu’ils riches soulagent la misère du monde, dont les responsables sont ces patrons de multinationales, aux fortunes colossales, que ces vedettes côtoient communément. On les voit cul et chemise avec les politiciens dans la presse « people » où ils se gaussent d’ailleurs de la bêtise et de la naïveté du peuple !

Le but de toute cette mascarade ? Faire oublier que hormis les handicapés, chacun est d’abord responsable de son propre sort et surtout de celui de ses enfants.

    L’appel à la charité publique révèle le pire des cynismes. Le huma 4 colonialisme, puis les multinationales gérées par la Finance mondiale ont spolié les ressources des pays pauvres en soudoyant de prétendus responsables politiques. Ils génèrent ainsi la misère de peuples entiers, pour accumuler du profit, en apportant aux Occidentaux un confort de plus en plus superfétatoire. Des Occidentaux qu’on cherche ensuite à culpabiliser en leur montrant sur leurs écrans de télévision la maladie, la faim, et la mort.

Don Quichotte « De quelque parti que l’on soit, que l’on ressente ou non de l’aversion pour cette société et son organisation, nous bénéficions (presque) tous du confort industriel moderne. Très peu d’entre nous se demandent sérieusement sur quoi ce confort repose, et quels effets il produit. Il y a là, nous semble-t-il, bien plus que de la connivence… Au contraire, c’est souvent d’une adhésion enthousiaste qu’il s’agit »

Amiech et Mattern, Le Cauchemar de Don Quichotte, P 9.

Mais la Finance mondiale, après avoir abusé les économies du tiers monde en les faisant travailler que pour l’exportation  (économies extraverties), a continué avec les pays industriels, en les transformant en post-industriels, c’est-à-dire en délocalisant leurs industries dans les pays émergeant, c’est-à-dire en appliquant la même politique qui a surpaupérisé le tiers monde. Une politique qui rapporte beaucoup aux affairistes, mais évidemment pas aux populations.

immigration 1 De multiples associations, d’ailleurs en pleine lutte de concurrence, nous tendent la main avec indécence, sans jamais expliquer quelle est la cause de cette misère : notre propre confort et notre consommation incessante de produits inutiles et jetables, mais qui nécessitent la destruction des cultures vivrières et la déforestation des pays pauvres.

    On dit que l’argent ne fait pas le bonheur, mais aujourd’hui, grâce aux médias, c’est le malheur qui fait de l’argent et qui souvent, fait vivre une armée de gentils membres d’associations aussi bidon que grassement subventionnées.

    Que ceux qui en doutent mettent leur nez dans les comptes, par exemple, des associations de réinsertion par le travail. Ils s’apercevront que, sur une année, une dizaine d’employés rémunérés ne s’occupent que d’une dizaine de personnes en difficulté à chaque fois, et qu’après ces stages, dits de réinsertion, seuls quelques-uns trouvent un emploi, où ils ne restent en général pas très longtemps. Mais ils découvriront surtout que le coût moyen par stagiaire est de 30 000 euros par an (en 2002). Comme il n’y a pas d’emploi pour ces personnes en difficulté, il serait possible de leur verser à chacun au moins 2 000 euros par mois. Mais alors, tous ceux qui sont employés dans ces associations seraient au chômage. Ce sont donc bien des parasites de la misère.

    Intermittents de la compassion, ils réclament à grand renfort médiatique, subventions et aides qui, ajoutées aux gabegies et autres détournements de fonds, assèchent les caisses de l’État. Un État qui est obligé de vendre  à des émirs ou à de nouveaux riches russes ou chinois, le Patrimoine national, qu’il est devenu incapable d’entretenir. Le contribuable, distrait par des émissions télévisées débilitantes, et désinformé, ne s’est pas rendu compte de la supercherie : sous prétexte de décentralisation, des Monuments historiques sont rétrocédés aux Régions sans les moyens inhérents à leur entretien. Ces nouveaux héritiers de richesses qui les dépassent, ne peuvent que les vendre à l’encan !

    Le budget du patrimoine est passé de 538 millions d’euros en 2002, à 420 en 2003, 358 en 2004 et 278 millions en 2005 ! (Le Figaro du 16 septembre 2005).  Déjà le Figaro du 9 juin 2005 nous montrait que c’était plus facile de créer des chômeurs que des emplois :  « Près de 10 000 artisans et ouvriers spécialisés vont bientôt se retrouver au chômage ». La plupart, d’anciens compagnons du devoir, très qualifiés en restauration de monuments historiques. Comment est-ce possible ? bébé 1 C’est à cause des politiciens, qui comme Ubu marchent sur la tête. L’Etat se désengage chaque année un peu plus de son rôle d’entretien du patrimoine. Nos chefs- d’œuvre sont donc de plus en plus en péril. Evidemment l’Etat ne peut pas tout faire, surtout vu son incapacité à se réformer, à lutter efficacement contre les gaspillages qui sévissent dans tous les ministères et toute la fonction publique (voir les rapports de la Cour des comptes depuis vingt ans). En 2006, la Ville de Paris, pour faire face à ses dépenses, a dû vendre pour 125 millions d’euros un grand nombre d’immeubles des beaux quartiers qui lui appartenaient. Comme le précise l’article du Monde (17 juillet 2006), ces immeubles « de rapport » ne rapportaient rien, puisque y étaient logés, pour des loyers dérisoires, des grands du  monde de la politique, de la haute administration et de leurs amis fidèles ! « Paris possède aussi de très nombreux terrains, villas, pavillons, forêts dans toute la France dont elle cherche à se débarrasser ». Un domaine acquis au cours des siècles au prix de prélèvements sur les contribuables et dilapidé en quelques années. Incapable de rétablir une bonne gestion des finances publiques, et pour éviter de franchir la barre des 3% de déficit, l’État en a même été conduit à vendre le droit de percevoir les péages sur les autoroutes, en se privant ainsi de recettes pendant près de trente ans.

bébé 1         En France, en l’an 2006, tout nouveau-né arrivait au monde avec une dette de dix huit mille euros, pour une dette nationale de 1150 milliards d’euros, soit 67% du Produit intérieur brut (20% en 1980). En comptant tous les engagements de l’État, la dette s’élèverait à 2500 milliards d’euros. Aujourd’hui, l’intégralité de l’impôt sur le revenu est engloutie par le paiement des seuls intérêts de la dette. La conséquence, c’est la dégradation de tous les services publics.

    Depuis quelques décennies, les gouvernements préfèrent, pour des raisons évidemment électorales, faire du « social » tous azimuts et en dépit du bon sens. Mais répétons sans cesse que prêcher la solidarité, l'entraide, le secours à tous les déshérités, est un leurre. C'est une illusion d'optique parce qu'elle empêche de voir et donc d’éradiquer la cause de la misère, c'est à dire l'exploitation, le vol, le mensonge, l'abus de pouvoir, la tyrannie des uns sur les autres. Sans les milliards d'euros détournés ou gaspillés par des soi-disant hauts fonctionnaires de l'Etat ou des politiciens corrompus, jamais condamnés ou bénéficiant de non-lieux ; sans les exorbitants privilèges, c’est à dire tous les droits acquis qui ne bénéficient qu’à une caste et dénoncés depuis trente ans sans aucun résultat,  il n'y aurait plus besoin de tendre la main pour quelques « pièces jaunes » ; il n'y aurait plus de problèmes de retraites, d'allocations pour personnes âgées ou d'allocations chômage.

sécu 1     La corruption et la cupidité sont partout, même parmi ceux qui ont prêté le serment d’Hippocrate : trafics de subutex, trafics à la CMU et à l’AME, fausses factures de prothèses dentaires etc. (Nice-Matin des 27 février, 1er, 4 et 5 mai 2007). Même si ces médecins, dentistes et pharmaciens ne représentent qu’une minorité, ce qui est le plus scandaleux, c’est que leurs pairs et les autorités de l’assurance-maladie ont fermé les yeux pendant de longues années, même sur les énormes arnaques de certaines cliniques (Aujourd’hui en France du 30 juin 2006 et du 23 avril 2007).

    Sans compter l’indulgence impardonnable de la justice, alors que ces médecins coupables d’escroqueries,  détiennent le pouvoir d’utiliser les fonds sociaux provenant de l’État et de tous ceux qui cotisent à l’assurance-maladie. Ils devraient donc être très durement pénalisés, et définitivement interdits de pratiquer la médecine *.

  

* Une escroquerie à la Sécurité sociale, qui se traduisait par l’envoi de médicaments remboursés, vers le Viêt-nam. Le procureur a requis trente mois de prison dont vingt avec sursis à l’encontre de M. A., l’un des médecins accusés d’avoir fait des ordonnances de complaisance pour un montant de 112.000 euros !   Nice-Matin des 10 et 11 mai 2007.

    « Selon que vous serez puissant ou misérable … »

    Il est à noter cependant que quelques-uns, parmi ces médecins peu scrupuleux, ont été amenés à enfreindre leur déontologie parce qu’ils avaient reçu des menaces ; parce qu’ils avaient peur. Que dire de cette République, où des personnes, dotées de l’autorité, comme les médecins, les enseignants, les juges, ou des policiers, ne peuvent exercer correctement leur métier parce qu’elles ont peur ?

    D’autre part, pendant des années, par naïveté, négligence, incompétence des dirigeants, des sommes colossales ont été escroquées à l’Assedic. L’URSSAF ne vérifiait même pas, auprès des services des impôts, si les entreprises déclarant des salariés, existaient vraiment, à l’ère du tout-informatique !

« Le département de prévention des fraudes et de contrôle interne n’a été mis en place qu’en février 2005 » (Aujourd’hui en France, 27 avril 2006) !

    « C’est un pillage de notre système social. » Noël Pons, auteur de Cols blancs, mains sales, éd Odile Jacob.

    Personne n’est allé non plus mettre son nez dans les effets des accidents de la route sur l’assurance-maladie.    Théoriquement, les sociétés d’assurances-automobile devraient rembourser les frais de soins et d’hospitalisation occasionnés à la suite d’un accident, or, ce n’est quasiment jamais le cas. Qui a chiffré ces sommes sans doute faramineuses ?

stade     Nous oublions bien vite les méfaits des super grands délinquants qui ont pignon sur rue et que nous encensons quotidiennement lors de nos grotesques messes médiatiques.

Les foules se précipitent avec enthousiasme dans les stades sans se préoccuper de ce qui se cache derrière les grands jeux populaires. S’il est si aisé pour les grands clubs de payer des transferts de plusieurs millions de dollars sur des « cagnottes » en Suisse où quelques autres paradis fiscaux, qu’est-ce que sont donc capables de faire les multinationales ?

    « Pour faire signer un contrat à [une star brésilienne] dans le club de la capitale, une filiale de Canal + a versé des millions de dollars en Suisse. » Le Figaro du 2 juin 2005.

égalité 1     Il y a une profonde contradiction à faire confiance aux institutions, qui selon Spinoza, doivent contraindre les dirigeants à la vertu, puisque ce sont les hommes eux-mêmes qui fondent et gèrent les institutions. Or, comment des êtres conduits surtout par l’intérêt, le désir de gloire, de pouvoir, de richesse, ou emportés par la haine, aveuglés par les idées reçues, pourraient-ils mettre en place des institutions véritablement démocratiques ?

    Pour Tchouang-tseu déjà,  « un prince ne se distingue pas d’un  brigand ».

    La démocratie est censée déléguer aux élus le pouvoir du peuple afin qu’ils le servent. En fait par la technique de la démagogie télévisuelle, la plupart des élus usurpent encore plus facilement qu’avant, le pouvoir du peuple pour servir Mammon*, le dieu Profit.

* Mot araméen qui, dans le Livre de l’Ecclésiastique, personnifie la richesse et les biens matériels dont l’homme se fait l’esclave. Terme employé par Jésus dans les Évangiles.

    L'éducation et la culture, comme la politesse, ne représentent que le vernis dont nous avons besoin pour nous supporter en société. La terreur, la peur, l'envie, la jalousie, mille causes craquellent ce fragile vernis, et la nature originelle de l'homme réapparaît : la bête malfaisante.

justice 1     L’histoire révèle que lorsque les peuples ont atteint un certain degré de civilisation, ils deviennent tolérants et trouvent des circonstances atténuantes à tous les délits, parce que pas un parmi eux, n’a vraiment la conscience tranquille. La justice n’a plus le temps de défendre la veuve et l’orphelin, tant elle est engluée dans des procédures, dont le seul effet est de permettre aux meilleurs avocats de sauver leurs clients les plus fortunés. Les juges ressentent tant de mépris pour eux-mêmes, après tous les non-lieux dont bénéficient les politiciens corrompus, qu’ils n’osent plus condamner les délinquants obscurs. Une délinquance qu’on appelle alors  incivisme, en croyant ainsi l’exorciser. Des juges laxistes, parce qu’ils savent, que ces délinquants sont bien moins responsables que les truands en col blanc, sans domicile fixe sur leurs yachts de cent mètres, qui mettent le pays en coupe réglée. Mais est-ce une raison pour laisser des délinquants multirécidivistes impunis ? Parce que ce serait la société qui les aurait corrompus ?

Tout un chacun admet facilement et avec raison que les politiques et les grands bourgeois sont pour la plupart corrompus. Or leurs penchants pour la corruption et la cupidité ne résultent pas d’une enfance difficile, et certes, ils sont bien évidemment irrécupérables. Pourquoi alors, voleurs à la tire, racketteurs d'adolescents, dealers de banlieues et autres délinquants à la petite semaine seraient-ils différents ? Pourquoi eux seuls seraient-ils des saints, corrompus par la société et donc, évidemment et systématiquement récupérables et excusables ?

« S’il est un préjugé sans fondement, c’est bien celui […] d’après lequel le savoir réel serait inséparable de ce qu’on est convenu d’appeler la moralité. On ne voit pas du tout, logiquement, pourquoi un criminel devrait être nécessairement un sot ou un ignorant, ou pourquoi il serait impossible à un homme de se servir de son intelligence et de sa science pour nuire à ses semblables, ce qui arrive au contraire assez fréquemment ». René Guénon, op-cit.

     « Dans vos jugements pas d’injustice ; tu n’accorderas pas de faveur au pauvre, tu n’auras pas de complaisance pour le grand ». Lévitique, 19, 15.

    « Une justice inspirée par la pitié, porte préjudice aux victimes. » Le Talmud.

   « En pardonnant trop à qui a failli, on fait injustice à qui n’a pas failli. » Baldassarre Castiglione (1478-1529).

    « Les délinquants font moins de mal qu’un mauvais juge. » 

Francisco de Quevedo (1580-1645).

      « On ne peut pardonner que ce que l’on peut punir »

Simone Weil

    Les magistrats sont les garants de la loi de la République, pourtant leurs malversations, sont peu poursuivies : au pire, une mutation, une mise à la retraite anticipée. Il n’y a pourtant pire crime que de tromper la confiance que le peuple met dans sa justice. On peut toujours trouver des circonstances atténuantes à un citoyen qui a enfreint la loi. Pour toute faute avérée, un juge devrait être condamné avec des circonstances aggravantes et être rayé de toutes les professions judiciaires et publiques. Il serait logique d’appliquer également les peines les plus dures aux élus corrompus, alors qu’ils s’en sortent toujours très bien.

    Trois ou quatre juges ont en charge les affaires financières, alors que toutes les grosses entreprises, gèrent des caisses noires faramineuses, et disposent d’une armée d’avocats spécialisés, dont certains sont uniquement engagés pour détecter les vices de procédure. Des juges et des avocats de renom donnent des cours, aux cadres supérieurs, sur les attitudes à adopter en cas de mise en examen et de garde à vue ! 

 

Autant que la pure corruption, l’électoralisme est un crime contre la société, contre les générations futures, et devrait-être puni en conséquence. Dans des villes déjà saturées d’automobiles, aux réseaux d’assainissement pléthoriques, les maires donnent à tour de bras des permis de construire aux promoteurs. Pollution x Les électeurs, les contribuables et surtout les parents acceptent  l’inacceptable. Des études de l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale), montrent que dans les écoles des grandes villes, le taux de dioxyde d’azote et de particules fines (présentes surtout dans le diesel),  provoque deux fois plus d’asthme et trois fois plus d’eczéma qu’ailleurs. Des enfants et des personnes âgées en meurent, dans l’indifférence générale. De plus en plus de petites maisons laissent la place à des immeubles, et la ville devient un univers concentrationnaire. Pourquoi ? Parce qu’une maison mongolfier individuelle, c’est une taxe foncière et une taxe d’habitation, et un immeuble, autant de taxes que d’appartements. Ainsi l’élu peut compter sur un accroissement de recettes, et continuer à promettre la lune et à saupoudrer sa manne. Demain sa ville sera totalement asphyxiée, mais il n’en a cure, il sera loin, à la retraite, dans un paradis fiscal.    À Rome, « la roche Tarpéienne était proche du Capitole », on y conduisait les corrompus et les traîtres pour les précipiter dans le vide. On peut rêver.

    Mais en fait, nous ne rêvons plus depuis que le 24 février 2005, le procureur Eric de Montgolfier, dans l’émission Pièces à conviction sur France 3, nous a convaincus, si cela était encore nécessaire, que la France était bien une république bananière. Une concussion innommable entre les élus et les juges. Comment cela est-il possible dans une démocratie ? Ceux qui font les lois et ceux qui ont la charge sacrée de les faire respecter s’entendent comme larrons en foire pour voler le peuple… toujours et encore en toute impunité !

    Dans Le devoir de déplaire, Eric de Montgolfier révèle également les dossiers de personnes intouchables et de potentats douteux, classés sans suite sous la pression de la hiérarchie.

    Même diagnostic d’Eva Joly, ancien juge d’instruction au TGI de Paris :

Joly     « Le crime d’argent est le point aveugle de notre monde, une dimension invisible… plus de 95 % de ces délits sont impunis. »  (in :  Notre affaire à tous, Les Arènes, 2000).

    « Si dans un pays vous avez un système judiciaire corrompu, c’est inutile de parler de droits de l’homme, parce qu’il n’y a pas un endroit pour les faire valoir. » (in Les chasseurs de caisses noires, documentaire, Arte 18 juillet 2006).

    « Les lois sont semblables aux toiles d’araignées, qui attrapent les petites mouches, mais laissent passer guêpes et frelons. »  Swift Jonathan (1667-1745).       

mafias     Terminons en disant que les mafias nagent dans la mondialisation comme des poissons dans l’eau, et qu’elles n’ont jamais été si florissantes. Les profits illégaux s’investissent de façon massive sur des marchés légaux en plein développement comme l’immobilier, les loisirs…  et même l’environnement, selon Jean-François Gayraud, auteur du Monde des mafias.

    La mer est aussi le terrain d’action des mafias de la mondialisation. La pollution des fonds marins leur importe peu. L’affaire de l’Érika a révélé le peu de confiance que le public doit accorder aux organismes chargés de la protection des océans, comme l’Organisation maritime internationale.*

* Selon Greenpeace :  « Contrairement aux organisations onusiennes, l'OMI ne fonctionne pas sur le principe " un État - une voix " mais en fonction du poids relatif des États en matière de transports maritimes. En conséquence, les pavillons de complaisance comme le Liberia, Panama, Malte et les Bahamas qui représentent 40% du trafic maritime, y font la loi. Les règles du droit maritime de l'OMI souffrent de ce fonctionnement favorable au lobby des acteurs privés, armateurs, propriétaires et grands affréteurs pétroliers. Les pavillons de complaisance sont des pays qui offrent des avantages fiscaux, un droit social au rabais et un laxisme quasi total en matière de réglementation (inspections des navires, etc.) Les règles de l'OMI, sont rarement contraignantes juridiquement et freinent ou rendent caduques d'autres règles internationales comme celles de la Convention de Bâle sur le trafic des déchets.

    Au cours de leur longue histoire d’abus de pouvoir, les hommes n’ont jamais été capables d’appliquer le premier principe de la démocratie : le respect de la loi, votée afin que chacun respecte l’autre. L’autorité judiciaire qui n’applique justiuce 2 pas la loi, par peur, démagogie, fausse compassion ou corruption, rompt la cohésion sociale. L’exemple venant d’en haut, la loi, qui est un contrat entre les citoyens, est considérée en fait comme une contrainte à détourner.

    Que l’homme commence déjà par respecter son voisin, avant de prétendre sauver l’humanité.

    En refusant de voir, on se donne bonne conscience de ne rien faire contre les causes.

    Faire l'aumône surtout à des institutions, c'est révéler sa lâcheté, c'est acheter à bas prix sa tranquillité, son irresponsabilité.

    Illusion d'optique encore une fois, parce que les bons Samaritains ne cherchent jamais à connaître le résultat de leur bienfaisance. Le résultat, soulager la misère, en fait, ce n'est pas leur but. Sans s'étendre sur le proverbe chinois trop connu qui dit qu'il vaut mieux apprendre au pauvre à pêcher, que de lui donner un poisson chaque jour, les bénéficiaires de la bienfaisance restent le plus souvent insatisfaits, frustrés, plein de rancœur pour le bon apôtre qui finalement est peu considéré. déloca 2 Comme le dit l'adage provençal : « Fais du bien à Bertrand, il te le rend en caguant ». Quant à apprendre au pauvre à pêcher, c’est devenu complètement anachronique, puisque non seulement il n’y a plus rien à pêcher, mais que tout ce qui peut être fabriqué, usiné est aujourd’hui « made in China » et demain « made in India ». D’autre part plus aucun mécanisme économique, social ou monétaire n’est aujourd’hui à la europe 1 disposition des élus, dans une Europe devenue grâce à eux, l’antichambre de la dictature  de la Finance mondiale.

    Quant aux associations et institutions humanitaires est-il encore besoin de mettre au jour leurs ambiguïtés. Sylvie Brunel, longtemps présidente d’une des organisations humanitaires les plus connues a écrit un livre, Frontières qui, sous une forme romancée, dit la vérité sur les ONG. Ce sont des entreprises comme les autres, avec des directeurs bien rémunérés à ne pas faire grand-chose, et une armada de petits chefs pour gérer trop peu de personnel sur le terrain, qui eux, se dévouent vraiment avec un immense courage, jusqu’à ce qu’ils démissionnent, écœurés pour la plupart, au bout de quelques années. ONG Des entreprises se livrant à une concurrence effrénée pour être sur les meilleurs coups médiatisés, afin de récupérer un maximum de dons. Comment se fait-il que ce livre, d’intérêt public, n’ait jamais été médiatisé, alors que l’insignifiant rejeton de n’importe quelle vedette de la chanson ou du sport, qui publie son ennuyeuse biographie, fait le tour de toutes les télévisions  ?

    De multiples associations ne sont là que pour nous tranquilliser ; il est tellement plus facile de se donner bonne conscience en leur versant quelques euros, sans trop se demander comment cette aumône sera gérée ; on se replonge ensuite avec quiétude dans la Grande Indifférence, plutôt que de se pencher sur les véritables causes de la misère qui se trouve à notre porte.

Sans nous demander non plus quelles sont les conséquences exactes de notre prétendue bienfaisance, et à qui elle rapporte.

  « [Doit-on soigner les maladies dans les pays éloignés, chez des peuplades encore primitives ?] Pourtant, je me demande si ce genre d’action n’est pas le premier pas vers la modernisation […] qui permettrait inévitablement à un industriel de Hong-Kong de venir installer quatre ou cinq machines à coudre dans un coin reculé du Mustang : et là, ces femmes souriantes, qui travaillent actuellement dans les champs ou lavent le linge dans les fleuves, seraient devant les machines huit heures par jour pour coudre des baskets ou des T-shirts » p 323. Tiziano Terzani, La fin est mon commencement.

    Les progrès de la science et de la technique auraient dû permettre à l’homme de réaliser une société où tout un chacun y aurait trouvé son compte.

    Au lieu de cela, les bénéfices du progrès ont été accaparés par quelques uns. L’industrie s’est développée en tant que productrice d’argent et de pouvoir, alors qu’elle aurait dû devenir l’outil du mieux être pour tous, avec comme seule contrainte, pour seul garde fou, le respect de la nature et de l’homme. Une telle société apparaît à l’évidence utopique. Si une société où les sujets peuvent vivre en paix et en harmonie, grâce aux progrès des sciences et des techniques, est véritablement irréalisable, alors c’est l’homme qui est en cause, et qui n’aurait pas dû naître.

pauvre3 Une illustration réaliste du Progrès bien peu mise en évidence : Population mondiale en 1850 = un milliard d’individus ; population vivant dans un dénuement total en 2000 = un milliard et demi d’individus !

    À partir de là, les protestations, les invectives, les réclamations, les charités, les solidarités, les plans et les contre-plans sont nuls et non avenus. Il n’y a plus rien à dire, il n’y a plus qu’à laisser l’engeance humaine s’autodétruire, n’en déplaise à la grande majorité de ceux qui manifestent une foi inébranlable en l’homme, après avoir mis leur foi en Dieu puis en la Providence. Ce ne sont que de pauvres Vladimir et Estragon, attendant « Godot ».

paradis fiscaux 2     En deux cents ans de très forte productivité, (grâce à un pétrole trop bon marché, malheureusement pour les générations futures qui en seront privées,) l’industrie des pays développés a, certes permis aux salariés, grâce à leurs revendications légitimes, d’obtenir des droits sociaux non négligeables. Mais le développement de la Finance mondiale, que n’avait pas prévu Karl Marx de cette façon, a peu à peu laminé ces avantages, avec la complicité des hommes politiques. Il n’y a pas que les gouvernants des pays africains spoliés, qui sont corrompus. La corruption est également mondialisée. À noter qu’en France, les ultra-libéraux ont été paradoxalement aidés par le syndicat CGT, manipulé par l’Union soviétique, pour être le plus démesuré dans ses revendications. Il a contribué ainsi aux difficultés de certains « patrons traditionnels », qui ont dû vendre leurs entreprises, soit à des banques, soit à des déloca 1 multinationales, lesquelles, en deux ou trois ans ont licencié les salariés français, fermé les usines et délocalisé la production dans les pays à main- d’œuvre « bon marché », mais surtout non-syndiquée. En plus de la manne du KGB, le syndicat aurait reçu celle de la CIA, il n’aurait pas fait mieux.

particules « Plus tard, la mondialisation de l’économie donna naissance à une compétition beaucoup plus dure, qui devait balayer les rêves d’intégration de l’ensemble de la population dans une classe moyenne généralisée au pouvoir d’achat régulièrement croissant ; des couches sociales de plus en plus étendues basculèrent dans la précarité et le chômage. » Michel Houellebecq, Les Particules élémentaires.

       La mondialisation c’est la globalisation du low-cost, la généralisation à l’échelle de la planète des bas salaires, c’est le meilleur moyen qui a été inventé pour casser le processus social des pays de l’Europe après avoir détruit, par le colonialisme, celui des pays pauvres.

« Le "global" dans l’ordre global signifie simplement la domination globale d’intérêts locaux et particuliers, par la soumission des multiples diversités d’économies, de cultures et de la nature, au contrôle de quelques entreprises multinationales, et des superpuissances qui les assistent dans leurs extension mondiale par le "libre" échange, par des programmes d’ajustement structurels et, de plus en plus, par des conflits militaires. » Maria Mies, Ecoféminisme.

simca     Insistons sur le fait que le progrès technique, dès le XVIIsiècle, grâce déjà aux machines qui remplaçaient le travail manuel, jusqu’à nos jours de très haute technicité, a multiplié la productivité ainsi que les biens mis à la disposition de la population. Dans Les Trente Glorieuses, Jean Fourastié, précise qu’entre 1800 et 1980, le volume de la production agricole a été multiplié par six et celui de la production industrielle par soixante. Mieux maîtrisée, cette productivité aurait dû revenir à ceux qui l’ont créée et à leurs enfants, en réduction du temps de travail, bien supérieure à celle qui a conduit aux 35 heures. Les bénéfices d’une croissance ininterrompue durant deux siècles auraient dû permettre d’offrir des activités artistiques, culturelles et sportives à tout un chacun et à conforter la sécurité dans les domaines de la santé, du chômage, des retraites et des aides diverses.

    À l’époque du passage à l’Europe des douze, cette sorte de démocratie sociale n’était pas utopique du tout. Elle n’obligeait pas ces douze, puis ces quinze pays européens à se refermer sur eux-mêmes : au contraire, leur expérience, leur exemple, leurs liens avec leurs anciennes colonies vis à vis desquelles elles étaient redevables, leur donnaient la possibilité de leur permettre un développement conjoint. Cette démocratie sociale véritable, qui permettait à tous ceux qui avaient contribué à cet essor, d’en faire profiter leur descendance, a fait très peur à tous les mâles dominants de la puissance financière mondiale, qui ont décidé de renverser ce processus, beaucoup plus dangereux pour eux, que leur prétendu ennemi, l’Union soviétique. Parce que l’Europe, elle, était en train de réussir.

Dans Combats pour l’Europe (1994), Maurice Allais , prix Nobel d’économie, montre la nocivité de la dictature mondialiste de l’ « Organisation de Bruxelles », avec la baisse ou la suppression des droits de douanes dans les pays de l’ouest européen, ouvrant la porte à  toutes les marchandises du monde, cause essentielle du chômage et de très graves déséquilibres financiers des Etats.

Grâce à l’immense force prédatrice de ses lobbyings, la finance mondiale a réussi à pourrir l’Europe de l’intérieur et à la transformer en victime consentie de l’OMC.

« L’un des enjeux de Maastricht est non seulement de pousser plus avant cette transnationalisation au niveau européen, mais aussi de permettre aux firmes japonaises, américaines etc., de coloniser l’espace commun et d’accroître la fluidité des échanges économiques, c’est-à-dire d’obéir aux lois de l’économie […] qui dépossèdent le citoyen et l’État-nation de la souveraineté, puisqu’elles apparaissent comme une contrainte que l’on ne peut que gérer  et en aucun cas contester […] Le citoyen n’a plus de raison d’être […] L’une des conséquences de ce fait est une certaine "fin du politique", c’est-à-dire la perte de la maîtrise de leur destin par les collectivités citoyennes au profit de l’hypercroissance d’une administration technocratique et bureaucratique. » Serge Latouche, La Mégamachine.

C’est ainsi qu’aujourd’hui les pays de l’Union européenne sont incapables d’instaurer ce que certains appellent de leurs vœux : l’allocation universelle de revenu de citoyenneté. Une impossibilité dans des pays endettés, soumis aux délocalisations, et incapables de gérer leur immigration.

    Lors des « Rencontres méditerranéennes » de Saint-Tropez (Nice-Matin, le 26 novembre 2006), le politologue Mustapha Benchehane, a rappelé avec opportunité un rapport interne de la CIA sur la  dilution de l’Europe :

« L’élargissement de l’Europe est encouragé par les États-Unis. Car de cette façon, l’Union européenne ne deviendra jamais une vraie puissance unie et donc un acteur décisif sur l’échiquier mondial ». 

    Les libéraux sincères, s’ils existent, devraient méditer également cette phrase attribuée à Alexandre le Grand, et reprise par Voltaire :

« Gardez-moi de mes amis ; mes ennemis je m’en occupe ».

Combien de journalistes et même d’experts économiques s’extasient sur la force de l’euro qui atteint régulièrement des records historiques !

« Une monnaie reflète la vigueur de son économie… » Aujourd’hui en France, 28 avril 2007.

Cette prétendue force n’est pourtant due qu’à la baisse    artificielle et voulue du dollar (28% par rapport à l’euro pour la période 2001-2005), qui ainsi pénalise les produits européens à l’exportation et favorise la balance commerciale américaine qui, sans cela, serait déficitaire depuis de nombreuses années. Une stratégie pour maintenir la croissance aux Etats-Unis. Ce sont donc les pays à monnaie plus forte, comme la Chine, le Japon ou l’Europe, qui financent en fait le déficit américain. Les quelques rares personnalités politiques qui réclament une politique monétaire de l’Union européenne, sont peu écoutées.

    Avec la mondialisation et ses conséquences sur la paupérisation de l’Europe, il faudra bien que les liens de proximité se renouent. Lorsque les Etats seront déclarés officiellement en faillite et qu’ils ne pourront plus verser les aides multiples qui sont autant de soupapes désamorçant les révoltes, chaque quartier devra bien se défendre contre des hordes qui « descendent en ville », bien plus dangereuses que celles chantées par Daniel Balavoine dans Starmania.

    Le drame de la démocratie, c'est que dans les moments difficiles elle ne peut résister, elle est balayée. Basée sur la raison, sur le contrat, elle ne possède aucune arme contre la violence politique, terroriste, guerrière ou même économique. La peur désagrège le ciment consensuel et c'est la panique, et de la panique naît la dictature.

    Une civilisation commence par devenir tolérante avant de disparaître, submergée par les barbares dont la seule force est justement l’intolérance. Les démocraties sont des sociétés qui ont gagné en humanité, mais qui ont perdu en conséquence, en capacité à résister à l’agressivité, à l’incivisme, à la violence extrême, à la barbarie. Elles se sont désarmées elles-mêmes et se retrouvent démunies et fondamentalement vulnérables, ce dont ses ennemis profitent sans vergogne.

Face à la barbarie, la bienfaisance est bien ridicule.

La bienfaisance ne sert qu'à justifier une existence qui sans elle paraîtrait bien inutile. Sauver les autres ou plutôt croire qu'on est capable de sauver les autres permet d'éviter d'entreprendre la délicate tâche qui consiste à tenter de se sauver soi-même.

    « Si au lieu de cultiver votre propre personne vous cherchez le bien des autres hommes, ne vous écartez-vous pas ainsi de votre tâche propre ? »

    « Les actes bons et justes ne sont généralement qu’hypocrisie et sont mis alors au service de la convoitise et de l’appât. »  Tchouang-tseu.

     « Le froid et la faim me paraissent moins hostiles que les méthodes inventées par l’homme pour s’en préserver. » Henri David Thoreau.

     « Si tu veux comprendre la vie, que ceci soit le commencement et comme l'assiette de tous les jugements et de tous tes désirs; tu n'as droit à rien, et personne ne te doit quelque chose, ni la société ni la nature. Et si tu leur demandes le bonheur, tu es un sot . Il y a des lois immuables qui gouvernent la possession de la gloire, comme la rencontre de l'amour, comme l'acquisition du bien-être. Elles t'enveloppent et te maîtrisent comme les saisons qui, sans s'inquiéter de tes cris, tour à tour te gèlent ou te brûlent. Ce que tu auras de la vie est un don gratuit: mille qui valaient mieux que toi ont été écrasés dès leur naissance… »     Hippolyte Taine (1828-1893).

    La charité, la solidarité ne sont concevables que lorsqu’elles sont une affaire de conscience personnelle. Dès qu’elles sont institutionnalisées par la religion ou la politique elles sont automatiquement amenées à servir en fait les intérêts de ceux qui la gèrent.

    Les revendications sur la solidarité et les droits de l’homme ne sont souvent qu’autant de parades médiatiques pour servir les professionnels de l’hypocrisie. Se faire aimer des hommes et acquérir de la renommée est facile en les flattant et en leur promettant la lune. Mais le désordre est inéluctablement la conséquence de la démagogie.

La Charité s’immisce là où la Justice a été renversée.

C’est à dire que la charité légitime l’injustice

« Il n’y a d’autre pauvreté que l’ignorance. » Le Talmud.

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